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Reconversion : un livre pour réinventer sa vie professionnelle

Si aujourd’hui la majorité des Français plébiscitent la reconversion professionnelle, les trentenaires cherchent aussi leur kif. Tout plaquer, oui, mais pour quoi faire ? Interview avec Marion de la Forest Divonne, 31 ans, qui publie Réinventer sa vie professionnelle… quand on vient de la commencer, un livre pour les millenials, génération « impatients ».
A 31 ans, Marion de la Forest Divonne, fraîchement reconvertie, livre ses conseils, sur un ton léger, ludique, jamais académique, dans un ouvrage à destination des trentenaires prêts à repartir de 0 niveau boulot : Réinventer sa vie professionnelle… quand on vient de la commencer.
Entretien avec cette jeune femme enthousiaste et persévérante, qui est passée du marketing au coaching à 28 ans. Une reconversion radicale dont elle dévoile les dessous… et les tabous.
Pourquoi avoir choisi d’écrire un livre sur la reconversion destiné aux trentenaires ?
J’avais vraiment l’impression d’être un cas isolé avec ma problématique de « trentenaire qui se pose des questions sur son job » ! Et pourtant… en partageant ma décision de reconversion autour de moi, notamment avec des personnes de ma génération, j’ai réalisé que j’étais loin d’être la seule à ne pas me sentir à ma place et à chercher davantage de sens. J’ai assisté à un effet « miroir » étonnant : j’avais l’impression que mon histoire réveillait des envies enfouies, chez des personnes que je pensais pourtant très épanouies dans leur job.
L’envie m’est alors venue d’aller plus loin dans cette enquête et d’étudier ce phénomène de « reconversions précoces » dans le cadre de mon mémoire d’école de coaching. C’est ainsi que j’ai mis à profit mon expérience de reconvertie et de coach pour écrire un livre sur la reconversion destiné aux trentenaires (et écrit par une trentenaire !).
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Qu’est-ce qui justement fait la spécifié d’une reconversion à 30 ans ? Quelles différences avec les autres générations ?
On dit beaucoup que les trentenaires cherchent du sens. C’est vrai, mais finalement toutes les générations cherchent du sens dans leur travail (tant qu’à faire !). Ce qui est vraiment différent, c’est qu’à 30 ans on est souvent en plein milieu de ses choix de vie : est-ce que j’achète un bien immobilier ? Est-ce que j’ai envie d’avoir un enfant ? Choix qui, la plupart du temps, posent une vraie question de compatibilité avec l’envie de reconversion. Encore plus pour les femmes.
Se reconvertir à 30 ans c’est aussi envisager une baisse de revenus soudaine, alors que vos amis prennent des postes plus importants et voient leur niveau de vie augmenter. Le décalage est parfois difficile à vivre, même si on est enthousiasmé par son projet. Si les jeunes reconvertis renoncent à moins que leurs aînés en termes de salaires et que leur décision est donc plus facile à prendre, d’un autre côté ils ont un matelas d’épargne moins important et peuvent donc vite revenir à un mode de vie quasi estudiantin (voire même pour certains choisir de retourner vivre chez leurs parents).
A 30 ans, les études supérieures sont encore proches. Pour ceux qui se sont vus financer leurs études par leurs parents, il peut y avoir un sentiment de culpabilité à vouloir faire totalement autre chose (et donc à ne pas rentabiliser l’investissement parental).
Autre différence flagrante : les personnes qui se reconvertissent de façon « précoce » n’ont souvent pas eu le temps de se construire une première identité professionnelle, étant donné que leur parcours a été relativement court. Du coup, la question de la légitimité (qui se pose dans toute reconversion, quel que soit l’âge) se pose encore plus, car ils n’ont parfois pas une première vie professionnelle « solide » à laquelle se raccrocher.
Et puis les trentenaires sont globalement plus impatients que leurs aînés. C’est à la fois un avantage, car ils ne croupissent pas des années dans un job qui ne leur plaît pas et passent vite en mode « solution » lorsque l’insatisfaction pointe le bout de son nez. Mais c’est aussi un inconvénient, car ils se mettent beaucoup de pression, alors qu’une reconversion demande du temps, de la patience et de la persévérance. De la même façon, leur « innocence » peut parfois les amener à idéaliser les choses et à voir uniquement les avantages du job dont ils rêvent, sans en envisager les inconvénients (exemple typique : « sans patron, c’est le bonheur ! »). Enfin, leur manque d’expérience fait qu’ils confondent très souvent le « déclencheur » d’un ras-le-bol dans leur job, avec une « vraie envie » de reconversion.
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D’où vient cette impression de « ne pas être à sa place » ?
C’est drôle comme les mots utilisés pour parler du manque d’épanouissement professionnel gravitent autour d’un vocabulaire très géographique… On voudrait trouver sa voie, avancer vers soi, se rapprocher de qui l’on est, avoir le sentiment d’être au bon endroit. Avec une destination rêvée : soi-même.
Moi, je ne me sens pas à ma place quand j’ai l’impression que l’environnement professionnel dans lequel j’évolue ne me permet pas d’être moi-même, d’exprimer ma personnalité, de mettre à profit mes talents et de me sentir alignée. Je me sens alors éteinte, sans relief. Ce besoin d’alignement revient souvent chez les trentenaires que j’accompagne en parce que cela montre qu’il est le reflet de ce qui les rend uniques. Quand ils se sentent à leur place, ils sont stimulés, ils ont des étoiles dans les yeux quand ils parlent de ce qu’ils font… et du coup ils rayonnent auprès des autres.
Enfin, comment résumeriez-vous les aspirations professionnelles de la génération Y ?
Globalement, les Y ont envie de flexibilité (travailler en home office, s’organiser comme ils le souhaitent), ils ont vraiment envie d’apprendre à mieux se connaître pour être plus épanouis et plus efficients dans leurs missions au quotidien (ils cherchent donc à être formés, coachés, mentorés). Et surtout, ils ont soif de reconnaissance, un point sur lequel l’entreprise a encore un beau potentiel d’amélioration !
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Un certain nombre de personnes ont été dégoûtées par le côté « mercantile » de leur secteur ou de leur job, notamment ceux qui travaillaient avant dans le marketing, la finance ou le conseil. Ils rêvent d’un job qui corresponde à leurs valeurs, leur éthique personnelle et plébiscitent donc une activité́ professionnelle qui apporte une contribution positive à la société́. De ce fait, tous les métiers permettant de se reconnecter au « faire », au concret, au « monde réel », au contact humain rencontrent un certain succès. Notamment parce qu’ils garantissent à ceux qui les exercent d’obtenir des résultats visibles à la fin de leur journée.
On parle beaucoup de l’entreprenariat aujourd’hui… Serait-ce le déclin du salariat ?
Pour ce qui est du déclin du salariat, je n’y crois pas énormément. Effectivement, l’entreprenariat est dans l’air du temps, mais la réalité c’est que ce statut ne convient pas à tous les profils ni à toutes les personnalités. Il y a des Y qui en rêvent, mais aussi beaucoup qui n’en ont pas du tout envie ! Je pense que le succès de l’entreprenariat aujourd’hui s’explique surtout par une fuite de l’entreprise. Beaucoup de Y n’ont pas la patience d’attendre que leur boîte s’adapte à leurs besoins, et partent assouvir leur soif de flexibilité / apprentissage / reconnaissance / alignement, en se mettant à leur propre compte. Le statut de salarié a touché́ à ses limites ces dernières années, et je souhaite sincèrement que les entreprises en fassent bouger les lignes pour mieux coller aux besoins des nouvelles générations !
Propos recueillis par Natacha Le Jort
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