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De Koh‑Lanta à l’entrepreneuriat

Ex candidate de Koh-Lanta, Alexandra Pharisien s’est lancée dans l’entrepreneuriat en créant Ap’titudes, sa propre société de recrutement. Rencontrée au salon Nouvelle Vie Professionnelle, elle revient sur ses motivations pour changer de vie. Une reconversion douce et pas du tout subie. Parole d’aventurière !
Quel a été le déclic de votre reconversion ?
Alexandra Pharisien : J’étais au salon de la reconversion car j’avais 20 ans d’expérience pro derrière moi avec une double caquette commercial-recrutement. En tant que consultante, je devais trouver des candidats ciblés par rapport aux besoins des entreprises, puis j’ai évolué en tant que chef d’agence.
Je ne voulais pas finir has been du recrutement. J’ai intégré une start-up pour me tourner vers le recrutement digital et me servir de l’intérim comme d’un véritable tremplin vers l’emploi, jusqu’à occuper une fonction de directrice commerciale (management de transition). Au bout de 6 mois, un déclic s’est passé : qu’est-ce que je fais de ces 20 ans ? Est-ce que je continue dans cette voie ou est-ce que j’ai suffisamment de métier pour faire du coaching RH ? C’est notamment la raison pour laquelle je voulais rencontrer des coachs au salon de la reconversion. Après 20 ans de carrière je peux faire autre chose, mais quoi ? Devenir coach ou monter ma boite ? J’hésitais avec l’entrepreneuriat.
Quelles réponses vous a apporté le coach ?
Alexandra Pharisien : Je n’avais jamais connu le chômage ni l’inactivité mais cette rencontre avec le coach m’a permis de faire un bilan, une espèce de scanner assez rapide de mon histoire et de mon futur. Ça m’a plutôt confortée dans ce que j’envisageais et sécurisé mes décisions. En France, on étiquette les gens. Les recruteurs sont encore très friands de diplômes et de profils copier-coller. J’avais envie de créer ma propre identité.
« On n’a qu’une vie mais on n’a pas qu’une seule histoire. »
Qu’avez-vous pensé du salon Nouvelle Vie Professionnelle ?
Alexandra Pharisien : Ce salon m’a fait du bien, même si je n’y ai pas passé assez de temps. J’aurais dû venir plus tôt car je n’ai pas pu aller à tous les ateliers et stands qui m’intéressaient. J’y ai trouvé une mine d’informations importantes et des témoignages intéressants comme ces deux femmes qui se sont lancées dans les peluches. Je me suis dit : dans « impossible », enlève le « im » ». Le salon est arrivé dans un moment de ma vie où ça donnait tout son sens.
C’est important que les entreprises puissent s’ouvrir à des changements de métiers et ce genre de salon a le mérite d’exister. C’est bien dommage de mettre des gens dans une case et de ne pas leur donner droit à une seconde vie pro qui leur permettait de se révéler dans un autre secteur et de ne pas finir complètement blasés dans leur job. C’est un vrai pacte social.
« Le déclic de ma reconversion, ça a été un mélange : sans doute la quarantaine, moment où l’on fait un bilan inconscient de la moitié de sa vie, et aussi l’effet Koh-Lanta. »
Quel a été justement l’impact de Koh-Lanta sur votre changement de vie ?
Alexandra Pharisien : J’ai fêté mes 40 ans à Koh-Lanta. C’était en 2016. J’ai fait le choix de partir du monde traditionnel pour me mettre en zone d’inconfort dans l’univers des start-up que je ne connaissais pas. Une transition pas forcément facile, sortir volontairement du cadre habituel, voir si je pouvais m‘adapter. On fait vite le parallèle avec Koh-Lanta : chercher un peu d’adrénaline, de nouvelles aventures humaines, se mettre finalement en danger. C’est avoir une utilité sociale et la recherche d’authenticité qui m’animaient.
Le fil rouge : déceler l’humain dans sa propre nature, dénuée de tout. Je n’ai pas été chercher le buzz pour faire d’autre émissions de télé réalité après, je m’en fous royalement. Je préfère être reconnue pour ce que je sais faire que connue. Il y a une dimension très introspective quand on fait Koh-Lanta mais qui ne parait pas forcément à l’écran. C’est quelque chose de puissant. Une expérience insolite très personnelle que de se mettre dans une situation d’isolement avec beaucoup de moments de la latence. Une fois qu’on a été chercher ses bulots ou des immunités, le reste c’est la vie à la Robinson Crusoé : on n’a rien (pas de livre, pas d’écran… ), juste la parole et la pensée. De l’émotion pure.
« Koh-Lanta, c’est un amplificateur de sentiments. Vous entendez votre petite voix intérieure que vous n’avez pas forcément le temps d’écouter dans le tourbillon de votre vie habituelle. »
Comment s’est passé le retour à la vie normale ?
Alexandra Pharisien : Il y a un avant et un après Koh-Lanta. J’avais envie d’un changement au retour de Koh-Lanta, comme beaucoup de gens qui y participent : certains changent de métier, d’orientation, de région, de pays… Les couples vacillent un peu, il y a beaucoup de divorces. J’ai mis 6 mois pour atterrir. A Paris, tout est trop simple : j’ai ma carte bancaire, j’achète à manger. La société de consommation vous saute au visage.
« Aujourd’hui, je sais ce que j’ai décidé de faire : j’ai été au bout de ma démarche, surmonté mes peurs, rencontré des gens en reconversion qui osent et qui ont de l’audace. »
Votre nouvelle vie d’entrepreneur vous plaît ?
Alexandra Pharisien : Je choisis ma façon de travailler, avec qui je travaille, ce qui est extrêmement galvanisant. Au départ, il y a la solitude de l’entrepreneur. Quand on se lance, on est seul. C’est très engageant financièrement. Ce sont des montagnes russes, des moments super up et des moments super down. Il faut être fort, apprendre à être son propre gestionnaire.
Et comment a réagi votre entourage par rapport à votre changement de vie ?
Alexandra Pharisien : Mon entourage familial m’a soutenue. Je me suis installé un bureau à la maison avec « défense de déranger », pour bien définir espace pro/espace perso. Mes amis ont été un peu mes ambassadeurs, ce sont les premiers à m’avoir fait connaître au service RH de leur boite, ce qui est extrêmement encourageant. De même, ma famille n’était pas surprise par rapport à ma décision de participer à Koh-Lanta, ce n’était pas la première fois que je tentais l’émission. Mes amis avaient plus de craintes. Ils m’ont dit : « T’’es folle ! »
En bref : les conseils d’Alexandra pour réussir sa reconversion pro
– Se faire confiance
– Se faire accompagner
– En parler autour de soi, savoir réseauter
– Faire un bilan professionnel, s’ouvrir des voies, s’auto-former avec des MOOC, des tutos
Il faut avoir une passion, ne pas rester seul, rencontrer des gens qui ont changé de vie, découvrir des métiers auxquels on n’aurait pas forcément pensé. Soit on reste dans une forme de confort et de routine, et on l’accepte avec les conséquences que ça implique (cela convient très bien à certaines personnes). Soit on se dit qu’aujourd’hui il y a des formations courtes, des secteurs d‘activité avec une pénurie de candidats, et l’on tente le grand écart professionnel avec une forme de liberté, d’audace et de courage.
Dernière question : regarderez-vous la nouvelle saison de Koh-Lanta ?
Alexandra Pharisien : Pas vendredi soir en direct, mais je vais regarder en replay. Je ne regarde plus l’émission avec le même œil car indirectement il y a une espèce de transfert qui se fait, qui me rappelle ce que j’ai pu y vivre. De la nostalgie.
Pour cette mère de deux enfants de nature enthousiaste et positive, Koh-Lanta a révélé quelque chose qui était déjà en elle, « ça l’a mis en lumière, en relief ». En plus de s’être rendue au salon Nouvelle Vie Professionnelle, Alexandra a suivi des ateliers de création d’entreprise, s’est fait accompagner par une consultante de l’Apec, mentorée par un ami lui-même reconverti et à la tête d’un cabinet de recrutement.
« De quoi tu as peur ? Lance-toi ! », s’était-elle dit. C’est chose faite, avec Ap-titudes, sa société de recrutement qu’elle crée à 42 ans afin de transmettre sa passion à d’autre personnes. Tenace et entière, l’ex aventurière pense avoir les compétences pour déceler les aptitudes chez les candidats à avoir un poste. Plutôt que « cabinet de recrutement », elle préfèrerait « cabinet de rencontres professionnelles » car pour elle « recruter, c’est faire se recruter, ce n’est pas juste évaluer ». Tout comme dans Koh-Lanta, les aptitudes à pouvoir s’adapter sont essentielles : « Il faut pouvoir vivre la transformation des métiers. Contrairement à une compétence technique qui s’apprend. On ne peut pas demander à quelqu’un de très introverti d’être commercial exubérant. C’est ma marque de fabrique. »
Propos recueillis par Natacha Le Jort
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